La Lettre Pop du 30 octobre 2024 : Première permanence de Service public populaire | Victoire pour les mères isolées | Comment sortir du travail qui ne paie pas ?
La première permanence de Service public populaire, une victoire pour les mères isolées au Parlement, un amendement pour taxer davantage les superprofits des armateurs et la question de la rémunération du travail dans la Lettre pop de la Ligne populaire.
La première permanence de Service public populaire a été un large succès
UNE PERMANENCE GRATUITE POUR LES CITOYENS. C’est l’ambition portée par Service public populaire, dont nous vous avions annoncé le lancement en réunion et dans la dernière Lettre. La presse en parlait aussi ici et là. Le lancement de notre première permanence d’accès aux droits et d’accompagnement pour les démarches administratives essentielles dans le centre-ville d’Evreux, pour aider les citoyens dans leurs démarches du quotidien, venait confronter à l’épreuve du réel notre constat selon lequel la disparition du contact humain a été dévastateur pour une grande partie de la population. Nous n’avions aucun doute sur le besoin d’écoute et d’aide, mais les gens allaient-ils se déplacer ?
LA FRANCE OUBLIÉE. La réponse à notre interrogation est sans appel : notre collectif composé d’une dizaine de bénévoles a reçu un excellent accueil à Evreux, dans le stand où nous nous étions installé à proximité de la place du marché. Pendant trois heures, nous avons reçu une quinzaine de citoyens et réussi à apporter un soutien concret à plusieurs d’entre eux (difficultés avec la banque, procédure de demande d’APL, retards injustifiés dans une procédure d’indemnisation etc.). La presse quotidienne régionale en parle ici. Nous avons aussi vu la détresse de plusieurs personnes, qui se heurtent à une administration devenue distante par la fermeture des guichets de proximité et qui sont entravées dans leur quotidien par la lenteur ou l’ineptie de procédures qui échappent au bon sens.
DES SITUATIONS SOUVENT UBUESQUES, PARFOIS DRAMATIQUES. Pour ne citer qu’un exemple de cas concret (avec l’accord de l’intéressée !) Marilyn, la soixantaine, est en situation d’invalidité, et ne s’en sort que grâce à une autorisation de découvert. Seulement mi-octobre, la banque lui a notifié que cette facilité allait être stoppée sous quinze jours, sans discussion préalable. Ainsi cette dame qui a travaillé toute sa vie jusqu’à son accident risque de se retrouver à la rue en raison d’une décision arbitraire et brutale, alors qu’elle parvenait jusqu’ici à s’acquitter de ses charges… Face à cette situation, en moins d’une heure nous avons procédé avec elle à un bilan de non-recours et préparé un courrier pour solliciter une médiation bancaire. Comme nous sommes venus sur le terrain avec ordinateurs et imprimante, Marilyn a pu repartir avec un courrier à poster et une démarche à suivre, avant une prochaine rencontre.
UN SUCCÈS QUI EN AUGURE D’AUTRES. A l’issue de cette première permanence, force est de constater qu’il y a un vrai besoin, et qu’il faut qu’on réplique ce modèle de permanences d’accès aux droits partout en France, en nous appuyant sur le tissu associatif local et militant pour développer notre implantation. Mouvement national, avec des adhérents venus des quatre coins de France, la Ligne populaire peut en être le moteur.
UNE MÉTHODE QUI GAGNE. Service public populaire est un mouvement apartisan. Mais si vous nous avez rejoint, c’est que vous espérez comme nous un renouvellement de la ligne à gauche. Et c’est bien ce que nous faisons : la défense des services publics est une idée de gauche. L’action concrète sur le terrain au contact des citoyens est une démarche de gauche. Celle que tant de cadres politiques ont oublié. Celle qui demain, peut nous amener à retrouver notre identité et à présenter une alternative crédible pour les classes moyennes et populaires.
L’actu vue par Philippe Brun
UN BUDGET PLUS JUSTE EST POSSIBLE. Les débats se poursuivent à l’Assemblée nationale, je vous y emmenais justement l’autre soir dans cette vidéo. Face à la Macronie et au RN, bien souvent main dans la main pour défendre les intérêts des plus aisés, nous avons fait passer plusieurs amendements pour mettre à contribution le monde financier plutôt que les classes populaires et moyennes : après avoir fait adopter un amendement créant une taxe sur le trading d’électricité, nous avons supprimé la hausse des factures d’électricité voulue par le gouvernement.
D’AUTRES VICTOIRES À NOTRE ACTIF. J’ai également réussi à faire adopter par l’Assemblée nationale mon amendement visant à encadrer la niche fiscale dont bénéficie les armateurs. Je ne souhaite pas la suppression de cette niche, parce qu’une vingtaine d’autres pays européens l’ont mise en place, mais son recalibrage car son coût est devenu inconsidéré compte tenu de l’augmentation du coût des conteneurs. C’est pourquoi j’ai souhaité mettre en place un mécanisme qui permet d’éviter l’explosion de la niche (détaillée ici) pour faire payer le plus juste impôt en cas de superprofit tout en garantissant la compétitivité de la marine marchande française.
VICTOIRE POUR LES MÈRES ISOLÉES. Enfin, plus tôt dans la semaine, un amendement que je porte de longue date sur la défiscalisation de la pension alimentaire pour le parent ayant la garde de l’enfant, a été adopté par l’Assemblée nationale. Je considère en effet qu’il est inacceptable que l’on paye des impôts sur des frais qui résultent d’une décision de justice. Le combat ne s’arrête pas là : dans notre pays, une famille sur quatre est monoparentale et dans 80 % des cas, ce sont des mères isolées. 40 % de ces foyers vivent sous le seuil de pauvreté. Il est urgent d’agir !
Un pas de côté
« Sortir du travail qui ne paie plus » grâce à une politique de gauche
Depuis les 35h du gouvernement Jospin (2000) et le “travailler plus pour gagner plus” de Nicolas Sarkozy (2007), le travail est perçu comme une valeur de droite. Face au “droit à la paresse” défendu à gauche, la lutte contre l’assistanat défendue à droite a conduit à de nombreuses réformes coûteuses pour les plus vulnérables : la réforme des retraites de 2023 ou le conditionnement du versement du RSA en sont les amers symboles les plus récents.
Nous devons proposer une contre-vision. Sur ce sujet, le dernier ouvrage d’Antoine Foucher Sortir du travail qui ne paie plus offre des pistes intéressantes. S’il s’inscrit sans surprise – ce haut fonctionnaire a été directeur de cabinet de Muriel Pénicaud (LREM) – dans une vision orthodoxe et libérale du marché du travail, passant sous silence le décalage croissant entre la productivité et la rémunération du travail, sa visée est juste : faire en sorte que travailler offre un salaire suffisant pour répondre aux besoins essentiels des travailleurs.
Le chemin que l’auteur dessine pour y remédier n’est pas inintéressant : faire porter les prélèvements obligatoires davantage sur les pans moins productifs de l’économie (héritage, revenus du capital, pensions de retraites) pour alléger les cotisations sur le travail. Il ne faut pour autant pas être naïf : les baisses de cotisations ont été massivement employées ces dernières années avec un résultat mitigé pour un coût exorbitant pour les finances publiques. Sans un contrôle strict, il est fort à parier que les baisses de cotisations souhaitées par l’auteur se transforment en hausse de marges pour les entreprises.
Toutefois, l’ouvrage a le mérite de replacer l’église au milieu du village et de poser une question que nous devons tous avoir en tête à gauche : alors que la taxation du travail est élevée en France, comment préserver notre modèle de protection sociale tout en rendant le travail plus rémunérateur pour les salariés ? C’est un chantier auquel nous devons nous atteler, précisément pour ne pas laisser la droite y apporter les réponses qui l’arrangent à notre place…